Community talk in Senegal

Histoire

Comment les débats communautaires sur l’éducation des filles au Sénégal transforment l’avenir de Khadija

« Garder les filles à l’école est une cause noble, cela doit être le combat de tous les parents » explique Moussa Amy Dieng, adjoint au maire et porte-parole des chefs de village de Ndindy, au Sénégal.

Au Sénégal, les fermetures d’écoles provoquées par la pandémie de COVID-19 ont eu un impact sur l’éducation de 3,5 millions d’apprenants, dont 47 % de garçons et 53 % de filles, sans parler des 1,5 million d’enfants qui n’étaient déjà pas scolarisés. Cela met en péril les progrès réalisés dans le pays pour maintenir les filles à l’école.

Avec le soutien de Wallonie-Bruxelles International, la campagne de l’UNESCO « Les filles au premier plan » a été mise en œuvre dans le cadre d’un projet déployé dans quatre pays d’Afrique subsaharienne : le Bénin, le Mali, le Nigéria et le Sénégal. L’accent a été mis sur les régions présentant les taux d’abandon scolaire des filles les plus élevés et les taux de rescolarisation les plus faibles chez les filles.

Le projet a mobilisé les réseaux de jeunes, les associations de parents et d’enseignants, les responsables locaux et les groupes de femmes, dans le cadre d’actions communautaires et avec le recours aux radios et télévisions locales et nationales. Les supports et les ressources de la campagne ont été adaptés et traduits en trois langues, le wolof, le peul et le sérère. Au cours de la dernière année, son action a touché plus de 30 000 membres des communautés, 10 000 filles et jeunes femmes, 3 000 chefs de village et 50 000 personnes du pays tout entier, grâce à la radio.

Mobiliser la communauté par l’intermédiaire de pairs éducateurs

Moussa Amy Dieng a participé à l’un des débats communautaires organisés par l’UNESCO et le Réseau National des Pairs Educateurs du Sénégal (RENPES), un réseau de pairs éducateurs qui œuvre à améliorer la santé, l’éducation, la planification familiale et la citoyenneté des jeunes au Sénégal.

Un groupe de 30 pairs éducateurs (14 parlant le wolof, 9 le peul et 7 le sérère) a reçu une formation basée sur les matériels de campagne pour acquérir les techniques de plaidoyer et les messages clés concernant l’éducation des filles. Les comités de développement local créés par les pairs éducateurs ont offert un espace permettant aux parents et aux chefs de village d’exprimer leur engagement à affronter les menaces qui pèsent sur l’éducation des filles et sur leur avenir, notamment le mariage d’enfants et les grossesses précoces et non désirées.

Des caravanes ont parcouru 67 villages, s’installant sur les marchés hebdomadaires pour organiser des forums avec les marchands, à propos des questions relatives à l’éducation des filles et à leur rescolarisation ou à leur maintien à l’école. Ces forums ont été essentiels pour mieux comprendre la position des parents sur l’éducation des filles et toucher plus largement les communautés. Les pairs éducateurs ont également organisé 150 débats communautaires et 50 visites à domicile dans ces villages, au profit des ménages les plus difficiles à atteindre.

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Transformer l’avenir de Khadija

Khadija, 10 ans, avait abandonné l’école en deuxième année pour aider sa mère chez elle à Ndindy. Elle a d’abord entendu parler de la campagne par son père qui a assisté à l’un des comités. À son retour, il lui a expliqué que les filles devaient être à l’école et que son éducation était importante.

Quand elle a vu la caravane arriver sur le marché de Ndindy, Khadija a couru dehors pour rejoindre le forum et elle a écouté attentivement les débats.

C’est alors qu’elle a décidé de retourner à l’école.

« J’ai tout à fait conscience des messages que vous avez transmis » a déclaré Khadija à l’un des pairs éducateurs. « Cela m’a inspirée à retourner à l’école. Je veux devenir sage-femme pour aider les femmes de ma région, car elles ont des problèmes quand elles accouchent. »

Les responsables, les parents et les autorités locales ressentent également les effets de la campagne. « Même si les conditions sont difficiles dans nos localités, nous, les parents, devons encourager et soutenir nos enfants pour leur donner une chance de réussir leurs études » a déclaré Moussa Amy Dieng. « Et surtout éviter de revenir au mariage précoce, sans leur consentement. »

Quelle est la prochaine étape ?

Au cours des forums organisés sur les marchés, les responsables ont indiqué qu’il était nécessaire d’encourager la réussite des filles par la réalisation de leurs droits. Depuis lors, ils ont pris des initiatives pour sensibiliser les parents à soutenir l’éducation des filles et à abandonner toute pratique susceptible de les empêcher de poursuivre leurs études et de réussir à l’école, comme les mariages précoces et forcés.

Ces responsables locaux se sont engagés à tenir des discussions dans leurs villages respectifs pour communiquer avec les chefs de famille à propos de l’importance de l’éducation des filles, mais aussi dans les mosquées et autres lieux de réunion des hommes et des femmes. Le début d’une nouvelle année scolaire sera crucial pour commencer à apprécier l’impact de ce travail important.