Actualité

Un programme de l’Inde en faveur de l’éducation multilingue remporte un Prix d’alphabétisation UNESCO

Literacy Prize 2022 laureates - India

L’Institut Kalinga de sciences sociales reçoit le Prix d’alphabétisation UNESCO-Roi Sejong 2022 pour son programme d’éducation multilingue basée sur la langue maternelle.

Fondé en 1993, l’Institut Kalinga de sciences sociales a pour objet d’éradiquer la pauvreté et d’autonomiser par l’éducation les communautés défavorisées de la société. C’est la première université autochtone à fournir de la nourriture, un logement, des soins de santé et d’autres nécessités, ainsi qu’une éducation gratuite à plus de 60 000 élèves d’Odisha, en Inde.

Depuis 2013, le programme « Éducation multilingue basée sur la langue maternelle » (MTBMLE) s’efforce de relever le défi de la faible rétention et de l’abandon scolaire des élèves autochtones à l’école primaire, qui résultent des barrières linguistiques dans la salle de classe et de l’incapacité des enseignants à gérer efficacement des classes multilingues et multiculturelles. Le programme s’emploie ainsi à combler le fossé entre la langue parlée à la maison et la langue de l’école, et à faciliter l’apprentissage des élèves en validant à la fois leur culture d’origine et leurs connaissances traditionnelles, en les préparant mieux au mode d’éducation classique. Le programme adopte un format hybride, avec des modules d’apprentissage en présentiel et à distance, tout en recourant à des solutions de faible technologie telles que la télévision, la radio et les SMS. De 2013 à 2020, 12 000 élèves ont ainsi bénéficié du programme, dont 48 % de filles et de jeunes femmes, avec un taux d’achèvement des études de 96 %.

Le programme s’est inspiré non seulement du contexte d’Odisha où « la diversité linguistique et le multilinguisme représentent un mode de vie », mais aussi surtout de la conviction que les valeurs sociales et culturelles sont enracinées dans les langues qui deviennent un outil permettant aux élèves autochtones de transmettre leur patrimoine culturel immatériel au sein de leurs communautés, de s’exprimer, d’entrer en relation avec d’autres élèves et enseignants et de mieux assimiler le contenu de l’apprentissage. À cet égard, M. Dwiti Vikramaditya, vice-président de l’Institut Kalinga de sciences sociales, a déclaré que « le MTBMLE est un programme qui contribue non seulement à améliorer les acquis de l’apprentissage et les résultats scolaires des apprenants, mais aussi à la durabilité et à l’inclusion. C’est l’inspiration qui a été à l’origine de la conception et de la mise en œuvre du programme au KISS ».

Le programme a été capable de transformer l’environnement traditionnel d’apprentissage de l’alphabétisation en créant un nouvel espace d’alphabétisation inclusif qui cible les besoins des apprenants qui risquent le plus d’être laissés pour compte et marginalisés dans un monde qui se transforme rapidement. En effet, il permet de créer un impact positif sur les résultats et l’attitude des élèves vis-à-vis de l’apprentissage et, en même temps, de promouvoir, préserver et maintenir au fil du temps les diversités multilingues, sociales et culturelles.

M. Vikramaditya déclare que « pour que les peuples autochtones deviennent des agents de changement pour leur propre communauté et pour l’ensemble de la société, différents mécanismes innovants ont été adoptés pour faciliter l’apprentissage des élèves et cibler leurs besoins, y compris des programmes d’enseignement de transition, le renforcement des capacités des enseignants, la participation des parents et d’autres parties prenantes concernées, l’interaction entre groupes de pairs, des salles de classe intelligentes pour ne nommer que quelques exemples ».

Pendant la pandémie, le programme a pu rester en contact avec les communautés les plus vulnérables et marginalisées en recourant à la télévision comme principal canal de fourniture de contenus d’apprentissage aux enfants restant à la maison et devant apprendre à distance, sans accès à des téléphones mobiles, à la communauté des réseaux d’ordinateurs portables. Après la pandémie, le KISS a commencé à créer des contenus numériques en langue locale (dialecte autochtone), pour combler la fracture numérique qui en a résulté.      

À l’avenir, le programme aspire à devenir un centre d’innovation, de recherche et d’élaboration de matériels d’enseignement-apprentissage dans les langues autochtones afin de contribuer à transformer les espaces d’apprentissage en Inde. Cependant, pour pouvoir passer à l’échelle supérieure et atteindre cet objectif, il est nécessaire, selon les mots de M. Vikramaditya, de « créer un écosystème où diverses parties prenantes se réunissent pour s’assurer que tous les enfants soient instruits selon une approche inclusive, durable et équitable ». En particulier, l’Institut espère être en mesure de nouer des partenariats et des collaborations avec des organisations, des institutions, des fournisseurs de technologie ainsi que des gouvernements pour continuer à dispenser une éducation tirant parti de l’innovation et de la technologie, afin de permettre aux peuples autochtones non seulement d’apprendre, mais aussi de promouvoir et de préserver leur patrimoine socioculturel, leurs systèmes de savoirs autochtones et leurs modes de vie durables.

À l’occasion de la Journée internationale de l’alphabétisation, l’institution envoie un message inspirant aux administrateurs et aux décideurs en charge de l’éducation : « Seuls les espaces d’apprentissage ont la liberté de protéger et de préserver les langues et la sagesse qui sont en train de disparaître. Ainsi, nous devons travailler plus dur, ensemble, afin de créer un espace adapté à un mode de vie durable et inclusif ».